L’œuvre s’inscrit dans une démarche où matériaux de rebut et gestes anciens cohabitent. L’artiste développe une approche critique et sensible, glissant des éléments contemporains dans des formes symboliques héritées. En mobilisant la technique de la cire filée, transmise par la Ciergerie de l’abbaye de Belloc et par l’artisan Donezar à Pampelune, elle détourne les usages codifiés de cette matière pour en explorer de nouveaux potentiels plastiques et narratifs. Le bois, travaillé en une forme verticale épurée, évoque les argizaiolak, planchettes rituelles utilisées lors des veillées funèbres basques, ici réinterprétées à travers une écriture sculpturale sobre et ouverte. Le socle, creusé dans une matière brute, reprend la forme de la cupule, en lien avec des formes rituelles primitives, inscrites dans la pierre.

Exposée pendant deux mois en extérieur, la sculpture est conçue pour être altérée par les éléments naturels. Cette mise à l’épreuve du temps et des conditions climatiques fait partie intégrante du processus, questionnant la fragilité des formes, la transformation des matières, et la porosité entre construction et disparition. L’installation rejoindra ensuite l’espace d’art de la Citadelle de Pampelune.

À travers un travail de friction entre matériaux pauvres et techniques précieuses, Estelle Deschamp interroge les hiérarchies implicites entre art savant et culture populaire, entre objets nobles et objets oubliés. Inspirée par les paysages pyrénéens et les lanternes des morts de Saintonge, Le veilleur d’Aujour’nuit tisse un récit où chaque matériau porte en lui une mémoire réactivée, un geste déplacé, une histoire fragmentaire.

En réinterprétant les formes rituelles sans les figer, l’artiste propose une lecture contemporaine du patrimoine immatériel, ancrée dans le territoire et ouverte à la transformation. Le veilleur d’Aujour’nuit engage ainsi un dialogue entre disparition et persistance, entre mémoire et invention.

Cette production est le fruit d’une collaboration avec Le Bel Ordinaire, l’association Fatras et la maison Joangi. Le projet a bénéficié du soutien du Ministère de la Culture – DRAC Nouvelle-Aquitaine, de la Région Nouvelle-Aquitaine, du Département des Pyrénées-Atlantiques, de la communauté d'Agglomération Pays basque.
Les œuvres ont été présentées à la Ciudadella de Pampelune dans le cadre du programme Argizari Galdua _ À cire perdue et sur le col d'Arnosteguy.